Lait de lapine

7 January 2012

De petite taille, très fécond et facile à modifier génétiquement, le lapin s’est vite imposé comme animal de choix pour la production de protéines thérapeutiques. Des chercheurs de l’Inra et de la société de biotechnologies française Bioprotein ont réussi à produire deux protéines du rotavirus, responsable d’une grande partie des gastro-entérites chez l’enfant, dans le lait de lapines transgéniques. « Ces protéines sont très immunogènes et se retrouvent dans tous les rotavirus », précise Louis-Marie Houdebine, directeur de recherche à l’Inra et conseiller scientifique de Bioprotein. Ainsi, elles pourraient, à elles seules servir de vaccins, après une étape de purification, sans effet secondaire.

L’intérêt de ce système de production est de pouvoir obtenir une quantité industrielle de ces protéines, avec peu d’animaux. « Quelques centaines de lapines transgéniques pourront produire plusieurs kilos de protéines recombinantes par an », estime Louis-Marie Houdebine. Outre sa multiplication facile et sa petite taille, le lapin ne possède pas de prions et offre une glycosylation meilleure que la chèvre, autre animal choisi pour la production de protéines thérapeutiques dans le lait. La glycosylation est une étape essentielle à de nombreuses protéines pour devenir fonctionnelles.

L’équipe de l’Inra travaille d’ailleurs sur les modifications génétiques spécifiques à réaliser pour augmenter les capacités de glycosylation du lapin.

Pour fabriquer le nouveau vaccin contre les rotavirus, les chercheurs ont inséré dans l’ADN du lapin les deux gènes qui codent des protéines de capside du virus, accompagnés des séquences pour que ces protéines soient produites dans le lait. Pour automatiser l’étape de traite, ils ont fabriqué en interne une machine à traire, miniature de ce qui existe pour les vaches. A chaque traite, 100 millilitres de lait sont obtenus par lapine, soit 15 litres par an. Ce procédé de production a fait l’objet d’un brevet publié en septembre dernier.

La chèvre aussi est mise à contribution

Même si la faisabilité de la production est désormais établie, quelques étapes restent à franchir pour arriver jusqu’au vaccin commercialisable. La purification de ces protéines à partir du lait ne sera pas si simple à réaliser, ensuite viendront les essais précliniques et cliniques. Les investissements nécessaires pour ces développements ne sont pour l’instant pas assurés.

Certaines molécules produites dans ce type de système ont déjà franchi ces étapes. Le néerlandais, Pharming Technologies, est en cours d’essais cliniques de phase II/III avec l’inhibiteur C1 humain, produit également dans le lait de lapine. Tandis que l’américain Genzyme Transgenic vient de déposer un dossier pour commercialiser l’antithrombine humaine III, produite dans du lait de chèvre transgénique.