Les molecules de l'apparence

7 January 2012

La testostérone et la DHEA

Un corps plus ferme après 50 ans

La testostérone est une hormone synthétisée par les testicules. Hors la sphère génitale, son principal site d’action est les muscles, sur lesquels elle exerce un effet anabolisant, ce qui expliquerait la différence de musculature entre les sexes.

Vers 40-50 ans, la testostérone biodisponible de l’homme diminue. A l’âge de 80 ans, son taux a chuté de 60 % environ. « Un homme qui manque d’hormone mâle voit sa masse maigre remplacée par de la masse grasse. Il se met à fabriquer des oestrogènes : les poils se raréfient, dans certains cas, la graisse s’accumule dans les cuisses, comme chez la femme », explique le Dr Sylvain Mimoun, directeur du centre d’andrologie de l’hôpital Cochin, à Paris. En France, la testostérone est surtout utilisée pour corriger des troubles de la libido. Le traitement existe sous trois formes (injectable, gel et comprimés). Les deux premières sont remboursées par la Sécurité sociale, la troisième ne l’est pas toujours.

La demande des patients porte rarement sur l’esthétique du corps, mais la testostérone peut-elle augmenter la masse musculaire chez l’homme vieillissant ? Sylvain Mimoun pense que c’est possible pour certains patients : « Il s’agit de ceux dont la testostérone biodisponible est inférieure à 1,5 nanogramme / ml et surtout ceux dont le taux est inférieur à 0,8. Un traitement ne résout pas tout, mais il peut agir indirectement sur l’aspect physique, en réduisant le recours aux somnifères ou aux psychotropes, en restaurant l’énergie, en encourageant donc la reprise d’une activité physique. Un patient qui suit un traitement et qui pratique un sport verra sa silhouette s’améliorer, son corps redevenir plus ferme ». Le Dr Stanley Korenman (endocrinologue, université de Californie, Los Angeles) estime que deux tiers des hommes de plus de 50 ans peuvent connaître une amélioration : « Je crois que les hommes plus âgés n’ont aucune raison d’avoir moins de testostérone en circulation que les hommes jeunes ».

Faut-il après 50 ans revendiquer - comme chez la femme un traitement hormonal pour corriger certains aspects du vieillissement, y compris esthétiques ? Sylvain Mimoun y est réfractaire : « Il faut s’en tenir au cas par cas. Comme tout traitement actif, une hormonothérapie n’est pas anodine ». Le principal risque est d’accélérer la croissance d’une tumeur de la prostate. C’est la raison pour laquelle, avant de proposer de la testostérone, les médecins pratiquent un examen clinique de la prostate et un bilan biologique, en dosant un marqueur de l’inflammation de la prostate, le taux de PSA (Prostate Specific Antigen).

La molécule de l’espoir

La DHEA (DiHydroEpiAndrostérone) est-elle l’arme antiâge promise pour demain ? Une étude (DHEAGE) réalisée par le Pr. Etienne-Emile Baulieu, de l’unité U33 de l’INSERM devrait être prochainement publiée. Elle a duré un an et a concerné 280 volontaires de 60 à 80 ans. Chaque jour, ils prenaient 50 mg de DHEA ou un placebo. Cette étude visait à vérifier l’innocuité de la molécule et évaluer ses effets sur l’humeur, la mémoire, l’immunité, le facteur de croissance IGF-1, le système vasculaire, la densité osseuse, la masse et la force musculaires et la qualité de la peau. En attendant ses résultats, on peut dire que, jusqu’ici très peu d’études ont été conduites en double aveugle, et très peu ont dépassé six mois.

La DHEA est un précurseur de la testostérone. Certains pensent qu’elle pourrait agir sur la PSA (Prostate Specific Antigen), qui est un marqueur de la prolifération des cellules de la prostate, et qu’elle pourrait s’accumuler dans l’organisme.

La DHEA, comme la pregnélonone, la mélatonine et l’hormone de croissance, voient leur taux baisser avec l’âge. La pregnélonone, qui est le précurseur de la DHEA, n’a pas fait, semble-t-il, l’objet d’essais chez l’homme depuis 1944. Sur le rat, des essais montrent une amélioration de la mémoire. Cet effet est peut-être dû à la transformation de la pregnélonone en DHEA.

La DHEA agit sur plusieurs marqueurs. Elle fait baisser l’interleukine-6, qui augmente avec l’âge. Dans le même temps, elle fait monter le taux d’interleukine-2 ainsi que le facteur de nécrose tumorale (TNF). Ces marqueurs sont des cytokines impliquées dans l’immunité. L’interleukine-6 (IL-6) a une action sur les lymphocytes B et T, mais elle stimule aussi les cellules de certaines tumeurs. L’IL-2 favorise la croissance des lymphocytes T. Le TNF a des propriétés antitumorales, antivirales et antiparasitaires. Il est donc prévisible que la DHEA puisse avoir des effets d’amélioration au niveau du vieillissement de la peau, des muscles et des os. Mais elle agit également sur les récepteurs des neurotransmetteurs du système nerveux central, provoquant une sensation de bien-être et une amélioration de la mémoire.

L’hormone de croissance, comme susceptible molécule antiâge, est déjà dépassée. Elle effet, elle nécessite une injection, elle coûte cher et par ailleurs, elle agit via l’IGF-1 (facteur de croissance des tissus, qui relaie l’action de l’hormone de croissance). Or, lorsqu’on prend de la DHEA, on voit l’IGF-1 augmenter, ce qui montre qu’il est possible de se passer de la prise d’hormone de croissance.

Quant à la mélatonine, aucune étude n’indique aujourd’hui qu’elle freine le vieillissement chez l’homme.

La recherche sur le vieillissement, du versant anti-âge, est-il un problème de santé publique ? La DHEA étant une molécule naturelle, elle n’intéresse pas particulièrement les laboratoires pharmaceutiques. Aussi, la recherche manquet-elle de moyens financiers. Si cette molécule est très en vogue dans certains pays, notamment aux Etats-Unis, il est rappelé que sa prescription en usage anti-âge est interdit en France. (... / ...)